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Le Moteur RENAULT  Cléon Aluminium

Le Moteur RENAULT Cléon Aluminium

Publié le : 19 juin 2019

Genèse

Le « moteur Cléon-Alu » plus récemment nommé Type A chez RENAULT, est le descendant d’un prototype de moteur 6 cylindres en ligne, tout aluminium, qui a été étudié pour le projet 114. Ce nom de code était celui d’une voiture haut de gamme destinée à remplacer la Renault Frégate. Les études de cette voiture avaient été lancées fin des années 50. Le projet en était déjà à sa phase de prototypes roulants, quand son coût de production fut jugé trop élevé, pour passer la phase de production en série. Le développement du projet 114 s'arrêta net. A sa place, il fut décidé de concevoir une voiture de classe moyenne supérieure, un peu moins haut de gamme et complètement innovante. Ce sera le projet 115 qui sera appelé Renault 16. Afin de limiter les pertes engendrées par l’arrêt du projet 114,  et de gagner du temps pour l'étude du moteur de cette nouvelle voiture,  Il fut décidé de supprimer deux cylindres à ce beau 6 cylindres en ligne. Ce dernier avait été conçu à partir d’une feuille blanche et intégrait des solutions techniques modernes à l’époque (position de l’arbre à cames, bloc tout en aluminium. C'est ainsi que naquit le fameux « moteur Cléon-Alu ».

 

Conception

 Reprenant toutes les bases du  6 cylindres, ce moteur avait les principales caractéristiques suivantes :

-Bloc et culasse en aluminium coulés sous pression

-Chemises humides

-Soupapes en tête

-Sens de rotation horaire (côté distribution).

Ce moteur sera appelé « Cléon-Alu » en référence à son lieu de fabrication et de la nature du métal utilisé pour couler son bloc.

Sa conception ingénieuse allie l'économie à l'efficacité. La position de l'arbre à cames placé très haut dans le bloc, lui permet d'avoir l'avantage du coût de fabrication limité d'un moteur à arbre à cames latéral tout en ayant les avantages techniques d'un arbre à cames en tête. Les tiges de culbuteurs très courtes, de faible inertie, permettent en effet, des régimes plus élevés.

 

Evolutions 

La famille de ces moteurs Type A (A pour l'aluminium)  se décompose en plusieurs groupes selon les évolutions et les versions.

 
Type A1K :

Cette version est apparue sur la RENAULT 16 en 1965, et a été la première dans l'ordre chronologique, y compris ceux appartenant à la famille Type A. Initialement appelé à ses débuts « 697 », Ce moteur avait un alésage /course de  76x81 mm, pour une cylindrée  totale de 1470 cm³. La culasse avait des soupapes  parallèles, avec l’avantage de proposer la solution économique de  l’admission du même coté que l’échappement.  

Alimenté par  carburateur Solex 35 ou Zenith 36, la puissance maximale atteinte était de  54 CV à 5000 tr / min, alors que le couple maximal était de 104 nm à 2800 tr / min. Dans certains pays avec un indice d’octane faible, une version fut réalisée avec un avec un rapport volumétrique diminué de 8,6 à 7,6: 1.

Une version très améliorée de ce moteur, équipée d'un carburateur à double corps et avec le rapport volumétrique augmenté jusqu'à à 10,25: 1,  a été développée par Renault Moteur pour  Lotus qui l’a utilisée pour son modèle Europe en 1967, monté en position centrale arrière.  Avec ces modifications, la puissance est portée à 82 ch à 6000 tr / min avec un  couple maximal de 108 N · m à 4000 tr / min.

Exemples de véhicules équipés :

RENAULT 16

LOTUS EUROPE et ALPINE A110 1500

 

Type AL

Ces moteurs ont été utilisés sur de nombreux modèles Renault.  De la Renault 16 TS, à l’Alpine A310 1600, en passant par les Renault 17, Renault 12G, Alpine A100 1600S.
Ils diffèrent tout d’abord par l’adoption d’une toute nouvelle culasse à chambres de combustion hémisphériques, conçue pour une meilleure combustion du mélange air /
essence. Par conséquent, les soupapes ne sont plus parallèles.  De plus, la cylindrée a été augmentée de 1470 à 1565 cc, grâce à une augmentation de  l'alésage et de la course,  qui est passé de 76x81 à 77x84 mm. Ces moteurs ont été proposés dans différentes variantes de puissance, en fonction des modèles sur lesquels ils ont été montés:

-Type  A2L ou 807: Ce moteur, dans sa configuration standard, avait un rapport volumétrique égal à 8,6: 1, comme dans la version de base du moteur précédent. Cependant, il était alimenté par un carburateur double corps Weber. La puissance atteignait les 83ch à 5750 tr / min, tandis que le couple était de  123 N · m à 3500 tr / min. De plus, cette variante a également été produite dans une version  avec  rapport volumétrique réduit ( 7,6: 1), pour les pays avec de l'essence à faible indice d'octane. Par ailleurs, cette version a été modifiée au niveau de la cylindrée (1605cm3)

Exemple de véhicules équipés :

RENAULT 16 TS

 

. Type  A2L ou 821 : Ce moteur, toujours basé sur le bloc de  1565 cc, est la version calme de la précédente: fournissait jusqu'à 67 ch à 5000 tr / min et un couple maximal atteint 113 Nm à 3000 tr / min. L'alimentation était  par carburateur simple corps Weber et le rapport volumétrique était de 8,6: 1. Ce moteur avait aussi une version à faible taux de compression, (55 ch) destinée à certains marchés.

Exemple de véhicules équipés :

RENAULT 16 TL

 

-Type  A2L ou 807-10: Cette autre variante est dans la lignée des 807 standard, mais avec un rapport volumétrique de  9:25: 1. La puissance maximale atteint ainsi 91 ch à 5500 tr / min, tandis que le couple maximal atteint 122 N · m à 3000 tr / min.

Exemples de véhicules équipés :

         RENAULT 15 TS

RENAULT 17 TL

 

-Type  A3L  ou 807-12 Cette version a été le premier moteur à injection à être monté sur un modèle de grande série de la gamme  Renault. Avec un rapport volumétrique de 10,25: 1, il délivrait  109 ch à 6000 tr / min. Très proche de ce régime, à savoir environ 5500 tr / min, était la valeur du  couple maximal : 134 N · m.  Pour des  raisons de réglementation sportive, à partir de la mi-1973, ce moteur a subi une légère augmentation de la cylindrée, passant à 1605 cc.  La puissance est restée pratiquement inchangée, sauf dans une autre version plus poussée, où elle est augmentée à 125 ch.

Exemples de véhicules équipés :

        RENAULT 17 GORDINI

ALPINE A110 1600 SI

 

-Type A2L ou 807-20 Cette variante alimentée par deux carburateurs Weber à double corps  avait un rapport volumétrique de 10:25: 1. La puissance développée atteint alors 125 ch SAE (113 ch DIN) à 6250 tr / min, avec un couple maximum de 140 N · m, délivré à un régime de 5000 tr / min. Cette version sportive , équipée d’un arbre à cames plus « méchant »  fut installée dans plusieurs modèles sportifs : Renault 12 Gordini, Alpine A110 1600S, Alpine A310 1600 avec une puissance de 113 à 118ch DIN.

Exemples de véhicules équipés :

        RENAULT 12 GORDINI

ALPINE A110 1600 S

ALPINE A310 1600

 

-Type  A5L  : Présenté en  1981, ce moteur est la seule variante des moteurs suralimentés appartenant au type A. La suralimentation était  produite au moyen d'un turbocompresseur Garrett assisté d'un échangeur air / air. Pour le reste, le rapport volumétrique est de 8,6: 1, avec un carburateur à simple corps. Dans un premier temps la puissance maximale atteint 110 ch à 5000 tr / min, alors que le couple maximal était de 181N · m, atteint à 2250 tr / min. À partir de 1983, la puissance maximale a été portée à 125 ch à 5500 tr / min. Mais l'année suivante, ce moteur a subi un dernier développement: en abaissant encore le rapport volumétrique jusqu'à 8: 1, et en modifiant la pression de suralimentation, la puissance a atteint 132 ch à 5500 tr / min, alors que le couple maximal atteignait 200 mN à 3000 tr / min. Ce moteur a été monté sur les Renault Fuego Turbo et Renault 18 Turbo, produites à partir de 1984 jusqu'à 1986.

Exemples de véhicules équipés :

         RENAULT 18 TURBO

RENAULT FUEGO TURBO

 

A2L type 807-G Ce moteur est une version particulièrement performante partant de la base du 1565 cc, conçu pour la Renault 12 Gordini  groupe 2, et exclusivement utilisé dans les voitures de sport. L’alésage et la course ont été modifiés ( passage de 77 à 77,8 mm.) et la cylindrée , est passée à 1596cm3 tout en restant dans la catégorie des moins de 1600cm3. De nouveaux pistons ont permis d’augmenter le rapport volumétrique à 11,5:1 . Avec des réglages de carburations différents, des ressorts de soupapes à raideur accrue, et un arbre à cames plus croisé, la puissance maximale a atteint 160 ch SAE (soit 145ch DIN), avec 167 N · m de couple.

Exemples de véhicules équipés :

         ALPINE 1600S groupe 4

RENAULT 12 GORDINI Groupe 2

FORMULES RENAULT monoplaces

 

Types A2M et A3M

Ces deux moteurs ont été les dernières évolutions des moteurs de type A. Dans ces moteurs l'alésage a été augmenté de 2 mm, passant ainsi de 77 à 79 mm. La cylindrée est donc passée de  1565 à 1647 cm3. L'alimentation était par carburateur. Jusqu'ici, nous avons mentionné les principales caractéristiques communes aux deux unités, mais il y avait aussi quelques différences notables entre les versions suivantes:

-A6M (ou Type 843) Cette variante est caractérisée par un rapport volumétrique compris entre 9:25: 1 et 9,3: 1 et a été proposée dans de multiples niveaux de puissance,  entre 80 et 98 CV. Il était équipé avec un carburateur double  corps.

Exemples de véhicules équipés :

         RENAULT 17 TS phase 2

RENAULT 16 TX

ALPINE A310 TX

 

-A5M (ou type 843): C’est la variante équipé d’un carburateur simple corps dérivant du moteur ci-dessus.

Exemple de véhicules équipés :

        RENAULT 18 GTS

 

-A1M (ou type 841): Ce fut une variante fortement dégonflée du précédent. Le rapport volumétrique a été ramené à 7,5: 1. Cela a entraîné une baisse drastique de la puissance maximale, qui ne pouvait atteindre 66 ch à 5000 tr / min. Le couple maximal atteint 111 N · m à 3000 tr / min , particulièrement adapté aux véhicules utilitaires.

Exemple de véhicules équipés :

         RENAULT TRAFFIC

En marge de la série

Des préparateurs talentueux ( dont Marc Mignotet) ont augmenté la cylindrée pour atteindre les 1860cm3.

A partir de 1972, RENAULT GORDINI, s’est chargé de développer des versions sur-vitaminées en partant de l’excellente base que constituait ce moteur.

L’ingénieur motoriste Bernard Dudot (qui travaillera plus tard sur les moteurs V6 turbo de F1, et les glorieux V10 F1 atmosphériques de Renault Sport), participa à l’élaboration du 807G , et au retour d’un voyage d’études aux USA, eu l’idée d’expérimenter la suralimentation par turbocompresseur sur ce moteur. Ainsi, une Alpine A110 fut équipée de ce moteur, et gagna à sa première sortie le critérium des Cévennes en 1972, pilotée par un pilote exceptionnel : Jean Luc Thérier.

Ce moteur monstrueux était une pure étude de laboratoire, et n’avait pas bénéficié de développements avant cette course. Seul le talent exceptionnel de Thérier put maîtriser un temps de réponse de l’ordre de 3 secondes, pour emmener la voiture à la victoire.

LE 807 G4

En juin 1973, Renault-Gordini démarre l'étude d'une version plus élaborée du 807 G. Ce sera le 807 G4. Ce nouveau moteur sera décliné en 2 versions : une version injection à carter sec pour les épreuves sur circuit et une version carburateur à carter humide destinée aux rallyes. Les ingénieurs (Bernard Dudot, Jean-Paul Boudy, François Castaing, Jean Coquery)  partirent des versions sportives en 1800cm3 et leur travail porta essentiellement sur la conception d’une culasse entièrement nouvelle et dans l'adaptation du bas moteur aux nouveaux impératifs et contraintes (graissage, nouveaux carter avant-arrière, adaptations périphériques, carter d'huile etc...).

Pour élaborer la culasse, l'équipe d'ingénieurs s'est largement inspirée des études qu'elle avait menées précédemment sur le moteur Renault-Gordini-Elf V6 2 litres CH 1, lui aussi à 4 soupapes par cylindre. Il s’agissait là, d’une culasse à double arbres à cames en tête, entrainés par chaine (et non par courroie) avec quatre soupapes par cylindre (d’où l’appellation G4 !). Ce super moteur développait pas moins de 200ch en version double carburateurs Weber DCOE, et environ 210ch avec l’injection indirecte à commande par guillotine.

 

L'étude et la réalisation de ce nouveau moteur G4 furent terminées en février 1974 ce qui permit d'envisager son utilisation pour quelques courses dans la toute fin de cette année. Notamment, pour le rallye Press on Regardless en novembre, sous le capot de trois RENAULT 17. Celle pilotée par Jean-Luc Thérier fut victorieuse.  

Des 804 G4 à carter humide furent ultérieurement alimentés par injection. Après homologation en groupe 4 (Grand Tourisme Spécial) et en groupe 2 (Tourisme Spécial), ce nouveau moteur sera couramment utilisé, sur les Alpine A110, A 310,  et sur les RENAULT17.

Plus tard et jusque dans les années  80, le préparateur Carcreff continuera l’évolution du 807G, (culasse standard à deux soupapes par cylindre) en  portant la cylindrée jusqu’à la valeur record de 2 litres, avec une puissance spécifique de 100ch/litre.  

Quelle belle fin pour le moteur de la tranquille RENAULT 16 de 1965 !

Cyril SOUTHAREWSKY.